Histoire – 21 octobre 1801, les hommes de couleur prennent le pouvoir en Guadeloupe

 Dossier Laméca

1802
La rébellion en Guadeloupe

HISTOIRE
21 OCTOBRE 1801, LES HOMMES DE COULEUR PRENNENT LE POUVOIR EN GUADELOUPE

 

En 1789, la population de la Guadeloupe se divise en trois classes juridiques : les esclaves, les Blancs et les libres de couleur. Ces dernier, bien que libres, sont victimes du préjugé de couleur et n'ont pas les mêmes droits que les Blancs. Ils profitent de la Révolution pour réclamer l'accès à la citoyenneté.

En janvier 1793, la République est proclamée en Guadeloupe par un envoyé de la Convention : le jacobin (républicain avancé proche des idées de Robespierre) Lacrosse. Ce dernier devient gouverneur provisoire. Il est rapidement remplacé par Collot, un modéré. Grâce à la République, les libres de couleur deviennent citoyens et par conséquent les égaux des Blancs. Ils participent activement à la vie politique. Certains sont députés à la Commission générale extraordinaire, assemblée ayant des compétences législatives. Cette institution est le lieu d'une lutte politique entre modérés et jacobins. Les citoyens de couleur se partagent entre les deux factions. Ce conflit fragilise la Guadeloupe qui est conquise facilement par les Anglais, en avril 1794.

En juin 1794, Victor Hugues, envoyé par la Convention pour abolir l'esclavage aux Iles du Vent (Guadeloupe, Martinique, Sainte-Lucie) et pour appliquer la politique jacobine de Robespierre, arrive au large de la Guadeloupe. A peine débarqué, il proclame l'abolition de l'esclavage et recrute des troupes parmi les anciens esclaves. Cette armée est encadrée par des officiers blancs et d'anciens libres de couleur. Elle fait rapidement la reconquête de la Guadeloupe.

Les opérations militaires finies, Victor Hugues, prétextant l'effort de guerre, met en place une dictature jacobine qui oblige les anciens esclaves à continuer de travailler pour leurs anciens maîtres avec la promesse d'une rémunération. Seuls les anciens libres de couleur et les esclaves engagés dans l'armée ou dans la marine corsaire bénéficient réellement de la liberté générale. Après le remplacement de Victor Hugues en 1798, l'armée, composée à moitié de Noirs, d'un quart de Blancs et d'un quart de métissés, s'agite de plus en plus et participe au renvoi de deux agents du pouvoir métropolitain, le modéré Desfourneaux en 1799 et le jacobin Laveaux, l'année suivante. Modérés et jacobins poursuivent leur affrontement politique. Toutefois, dans cette période agitée, un salaire est établi pour rémunérer les anciens esclaves.

Le 9 novembre 1799, Napoléon Bonaparte devient Premier consul et souhaite la fin des troubles dans les Colonies. En mai 1801, Lacrosse revient en Guadeloupe, en ayant abandonné ses idées jacobines. Il est chargé de reprendre en main l'armée de couleur et de déporter les néo-jacobins. Il mène une politique vexatoire à l'égard des militaires de couleur.

Le 21 octobre 1801 (29 vendémaire an X dans le calendrier républicain), les capitaines Joseph IgnacePierre Gédéon et le chef de brigade Magloire Pélage, tous officiers de couleur et menacés de déportation, se rebellent à Pointe-à-Pitre. Ils sont aidés par quelques officiers blancs néo-jacobins. Deux jours plus tard, Pélage accepte de devenir commandant en chef de l'armée. Le 24 octobre, Lacrosse, à Basse-Terre, au moment du soulèvement de Pointe-à-Pitre, est fait prisonnier. Son aide de camp Louis Delgrès rejoint le rang des rebelles. Un Conseil provisoire de gouvernement se met en place. Il est composé de trois sang-mêlé (Pélage, président, Danois et Corneille fils) et de deux Blancs (Frasans et Piaud).

Pour la première fois et ce huit ans après leur accès à la citoyenneté, des hommes de couleur occupent les plus hautes responsabilités administratives et militaires de la Guadeloupe. Ils partagent le pouvoir avec des Blancs, pour la plupart jacobinsPélage instaure un pouvoir autoritaire et mène une politique en faveur des notables et contient la masse des anciens esclaves. Il garantit à ces derniers le versement d'un salaire, mais il utilise aussi la répression. Il manifeste sa fidélité à la France consulaire en réclamant la venue d'un haut fonctionnaire pour occuper la place laissée vacante par le renvoi de LacrossePélage est prêt à se soumettre, sans condition, à tout envoyé de Bonaparte autre que Lacrosse. Ce dernier décrit au gouvernement consulaire Pélage et ses compagnons comme des rebelles anarchistes (c'est-à-dire des néo-jacobins) et réclame une expédition militaire contre eux.

Massoteau et Delgrès, en garnison à Basse-Terre, méfiants, écartent de l'administration et de l'armée les Blancs peu sûrs et commencent à recruter davantage de troupes de couleur. Pélage rappelle Massoteau à Pointe-à-Pitre et met fin à ces enrôlements. En février 1802, Leclerc entre en campagne à Saint-Domingue contre Toussaint Louverture. En avril 1802, Pélage se satisfait des défaites militaires du général noir.

Le 6 mai 1802, Toussaint Louverture se soumet à Leclerc, après trois mois de lutte. Le même jour, Pélage se rend sans condition au général Richepance, général en chef de l'expédition chargée de soumettre les rebelles de la Guadeloupe.

 

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SOMMAIRE

HISTOIRE
21 octobre 1801, les hommes de couleur prennent le pouvoir en Guadeloupe
6 mai 1802, le Général Richepance arrive en Guadeloupe pour y rétablir l'ordre
Baimbridge et Fouillole dans la tourmente révolutionnaire de 1802
Matouba, 28 mai 1802
L'agitation politique en Guadeloupe entre 1794 et 1802
Chronologie

PERSONNAGES
Le combat de Delgrès
Le combat de Richepance
Biographies des principaux protagonistes

ETAT DES LIEUX
Les communes de Guadeloupe
L'agriculture en Guadeloupe en 1799
La population de Guadeloupe en 1796
La politique coloniale de la France à l'époque révolutionnaire

REFERENCES
Textes historiques
Glossaire historique
Textes littéraires
Illustrations audio-vidéo
Bibliographie

crédits

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par Frédéric Régent

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