Dossier Laméca
Aspects de la littérature de jeunesse dans la Caraïbe francophone
6. L'EAU, UN MOTIF OBSEDANT
La nature est souvent prétexte – quand elle n’est pas un personnage à part entière - pour dire la culture, les us, le mode d’exister, la perception du monde.
L’eau est déclinée sous toutes ses formes : la mer, la mangrove, les rivières, les fleuves, les mares, ...
L’eau ritualisée
« Le bain de feuillages », une coutume bien partagée, a bien sûr une fonction hygiénique et curative, mais surtout magique. Il protège contre le mauvais sort et prépare le corps aux épreuves de la vie.
Max Rippon et Ernest Pépin décrivent tous deux ce rituel :
Le soir venu, c’était l’heure du bain. Dans la terrine ocre que tante Gabou avait mis pleine d’eau, à perdre de la fraîcheur la journée durant au soleil, elle me faisait laver ma figure, entrer dans l’eau tiédie par la chaleur. Je prenais un bain-décrassé, avec des feuilles de devant-nègre, du dattier écrasé, quelques branches de glycérine, du lait d’iris et une pleine main d’alcali.
(Max Rippon, Le Dernier matin, Jasor, 2000)La rentrée approche … La bassine d’eau a recueilli toute la chaleur du soleil. Nannine y a ajouté des feuillages frais aux vertus miraculeuses. Se baigner, en fin de journée, devient un voyage parmi des senteurs de feuilles – corossol, feuilles – goyave…
Je suis debout dans la bassine. Nannine épluche énergiquement mon corps. De temps en temps elle m’arrose avec un kwi (demi-calebasse évidée et séchée).
(Ernest Pépin, Coulée d’or, Gallimard, 1995)
L’eau apaisée…
La mer est partout présente.
Elle a surtout été vécue de façon utilitaire : un moyen de se nourrir, de se déplacer…
Elle inspire des sentiments divers :
plaisir / peur, reconnaissance / méfiance, amour /haine,
ce qui explique les rites magiques pour l’apprivoiser.
L’eau, c’est aussi le fleuve, au coeur des Aventures sur le Maroni.
L’eau en furie
Conjuguée au vent lors des cyclones, l’eau reste une source d’inspiration :
Soudain, les grands vents se sont levés.
Ils se sont mis à courir et à faire la ronde autour de la maison. On aurait dit ces hordes de chevaux à moitié sauvages comme on en voit dans les westerns américains qui, ayant rompu leurs lanières et piétiné leurs enclos, galopaient, hennissaient furieusement, se cabraient dans la nuit d’une main souveraine, tournoyer, lancer leurs branches dans l’air…Déjà de grands paquets d’eau frappaient furieusement contre la façade et s’infiltraient par tous les interstices.
(Maryse Condé, Hugo le terrible, Sépia, 1991)
Des livres pour les enfants des Antilles
Pour encourager la création et enrichir la littérature régionale destinée à la jeunesse, la Bibliothèque centrale de prêt de Guadeloupe organise, en 1978, par le biais de l’association les Amis de la BCP, un concours de manuscrits de livres pour enfants.
Ont été primés :
1978 : La Petite grenouille des Antilles - 1979 : Youri et la petite souris - 1980 : Tibouchina : conte créole bilingue de Hector Poullet et Sophie Mondésir, Messidor-La Farandole et Servedit, 1990
1998 : Au bout du chemin de Cléty Chipotel-Brena et Patricia Navet, Editions Jasor et le Conseil Général de Guadeloupe
On peut signaler qu’à l’occasion de la commémoration du cencinquantenaire de l’abolition de l’esclavage, un jeu des sept familles « L’abolition de l’esclavage » a été réalisé par les bibliothèques et illustré par le peintre Antoine Nabajoth.
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SOMMAIRE
1. Emergence d’une littérature. Des thèmes et des traits récurrents
2. Reflets d'enfance
3. Instruire …
4. … pour comprendre hier …
5. ... et pour vivre aujourd'hui
6. L'eau, un motif obsédant
7. Une nature omniprésente
8. La grand-mère, pont par delà les mers
9. Le conte entre tradition et modernité
10. Mots d'enfance
11. L'affirmation d'une littérature
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par Nicole Brissac
© Médiathèque Caraïbe / Conseil Départemental de la Guadeloupe, mars 2007-décembre 2024