2-Le quadrille dans les sociétés coloniales des Antilles

Dossier Laméca

Les quadrilles de la Caraïbe

2. LE QUADRILLE DANS LES SOCIÉTÉS COLONIALES DES ANTILLES

 

De la contredanse française aux quadrilles créoles

Peu avant la Révolution française, dans les années 1780, la contredanse était appréciée au point où dans les bals, les danseurs réclamaient souvent plusieurs contredanses d'affilée. Une série de contredanses exécutées par un même groupe de danseur s'appelait alors un "pot-pourri" et pouvait contenir jusqu'à neuf danses. Toutefois, bien qu'elles soient réunies dans un pot-pourri, à la fin du 18ème siècle les contredanses étaient toujours conçues individuellement. Chacune avait sa musique, ses pas et ses parcours distinctifs. Sous l'Empire, afin de mieux répondre aux attentes des danseurs, les compositeurs prirent l'habitude de concevoir la musique des contredanses par groupes de trois, huit ou plus. Au cours des années 1820-25, la série de cinq contredanses devint peu à peu la norme tandis que le nom de la danse changeait. Jusque-là le mot "quadrille" avait désigné la disposition en carré des huit danseurs de contredanse à la française. Après 1825, l'habitude est prise de nommer la série de cinq contredanses conçues comme une danse en cinq parties "quadrille français". Au début les contredanses constitutives des quadrilles sont très variées. Dans les années 1840, le quadrille devient un enchaînement fixe de quatre contredanses plus une qui conclut la suite, une 'finale' que les danseurs choisissent parmi les danses qui correspondent à la mode du jour. Une fois figé, le quadrille entre en phase de déclin dans les bals européens.

 

Danses sociales, danses-symbole

Par effet de mode, toute danse particulièrement prisée en Europe et notamment en France, en Angleterre ou en Espagne (principaux colonisateurs des Antilles) pendant la période esclavagiste et coloniale, faisait fureur dans les colonies. Dans les années 1780, quand la contredanse se retrouva élément favori des bals de Marie-Antoinette, les planteurs des colonies françaises se mirent à embaucher des maîtres de danse et des maîtres de musique pour apprendre à la danser. Il leur était particulièrement important que leurs filles maîtrisent la danse au cas où elles auraient à paraître à la cour ou dans un salon élégant. La maîtrise de la contredanse était en effet, une façon de montrer qu'on avait de l'éducation. Il n'est donc pas surprenant que la mode de la contredanse française seule puis en pot-pourri ait gagné les colonies des Antilles très peu de temps après qu'elle soit apparue en France. La contredanse anglaise a elle aussi été introduite dans les Antilles suivant un processus comparable. L'arrivée du quadrille proprement-dit a coïncidé dans les Antilles avec la période des abolitions, ce qui a renforcé les notions d'élégance et de bon goût qui tendaient déjà à lui être associées. L'attrait que les esclaves et noirs libres des sociétés coloniales esclavagistes ont ressenti pour cette danse participait aussi du préjugé de couleur sur lequel reposaient ces sociétés coloniales et esclavagistes.

 

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SOMMAIRE
Définition
1. Les antécédents européens : cotillon, contredanse française et longway anglais

2. Le quadrille dans les sociétés coloniales des Antilles
3. Appropriation, créolisation, re-création
4 a. Le quadrille aujourd'hui : Cuba

4 b. Le quadrille aujourd'hui : Haïti
4 c. Le quadrille aujourd'hui : Sainte-Croix et Saint-Thomas
4 d. Le quadrille aujourd'hui : Guadeloupe
4 e. Le quadrille aujourd'hui : Dominique
4 f. Le quadrille aujourd'hui : Martinique
4 g. Le quadrille aujourd'hui : Sainte-Lucie
4 h. Le quadrille aujourd'hui : Carriacou
En guise de conclusion
Illustrations musicales
Bibliographie

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par Dr Dominique Cyrille

© Médiathèque Caraïbe / Conseil Départemental de la Guadeloupe, 2018